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jeudi 19 septembre 2013

suburbia, naissance d'un mythe.





Chez nous, la banlieue n'a pas la même signification. Bien que, tout comme aux Etats-Unis, nous aspirons à une vie tranquille en campagne, le mouvement n'a jamais vraiment été aussi explosif qu'en Amérique. Le manque d'espace de l'Europe est sans doute la raison principale bien que notre mentalité a aussi contribué.
Quoi qu'il en soit, l'Amérique est le pays de la banlieue individualisé à l'extrème. Tellement qu'aujourd'hui, certains réfléchissent a un nouveau modèle de développement plus urbain, plus dense, en soi, plus européen.

Depuis le crash immobilier (housing bubble) récent de 2006, l'Amérique se retrouve avec un surplus évident de maisons toujours plus éloignés du centre-ville (downtown), avec comme seules connections, les "connectors". La population résidant dans ces immenses champs n'a comme seule solution la voiture pour se déplacer d'un bout à l'autre. Alors que chez nous, les bus, trains sont nombreux et disponibles partout sur le territoire, en Amérique, le tout voiture fut privilégié dés le début.

En effet, les premières banlieues en Amérique était des "lots" en bordure de centre urbain où des ingénieurs ont eu l'idée de reproduire le caractère campagnard des contrées proches tout en amenant le progrès de la civilisation urbaine. C'est ainsi que les premières banlieues furent toutes reliées par des "trolleys", des trams qui se chargeaient de faire amener les résidents de ces banlieues sur leurs lieux de travail et inversément. En somme, ce que nous européens, profitons encore aujourd'hui. 

Pourtant, tout change avec l'arrivée de l'automobile, la plus grande invention américaine. 
La Ford T du célébrissime entrepreneur du même nom fait son apparition dans les années 1900, c'est alors que les ventes explosent. Les américains commencent à devenir la nation de l'automobile, celle qui définit à merveille ce vaste pays sillonnés de Highways, signe de liberté, d'espace, d'individualisme.
Le lobby de l'automobile n'attend pas longtemps pour demander a l'état la planification d'un immense système de transport à travers le pays. C'est le début des Highways au Etats-Unis. Les traverses des trolleys qui transportaient avec charme les résidents des banlieues commencent à être démanteler, remplacer par des connectors et les nouvelles constructions s'envolent. 

Nous arrivons au premier crash boursier de l'histoire, 1929.
Le crash est sans prétendant, d'un nouveau type, il provoque pour la première fois l'affaiblissement d'un pays qui se pensait tout puissant. Pourtant, les américains, malgré leurs difficultés financières, refusent de céder leurs voitures récemment achetés. Signe d'un attachement qui ne cessera de grandir pour désormais la reine automobile. Malgré le crash, la banlieue reste l'aspiration de millions d'américains, c'est ce rêve américain en construction qu'ils désirent atteindre.
Il faudra attendre la fin de la guerre 40-45 pour véritablement mettre en route la machine à rêver, le rêve américain se forme et pour durer.

suite...



En effet, avec le retour des forces armées sur le sol américain, le besoin d'habitations est pressant et le gouvernement américain n'hésite pas à créer un projet de loi (bill) qui scelle véritablement le destin de l'Amérique.
La première véritable banlieue moderne suit et voit le jour à Staten Island, un endroit à proximité de New-York. Capable d’accueillir des milliers d'habitants dans des maisons uniformisées, le concept fait mouche et devient la norme. Dans les années 50, l'Amérique est en plein boom économique et semble ne jamais s'arrêter de grandir. Elle devient superpuissance et la première puissance mondiale dépassant le vieux continent européen.
Désormais, les américains semblent vivre pour consommer, toujours plus, est le credo des américains.
La banlieue américaine explose.  C'est le mode de vie des américains. Les villes se vident de leurs habitants qui migrent à toute allure vers l'artificiel campagne créée de toute pièce par les promoteurs. Les marginaux s'emparent des quartiers urbains délaissés. Commence alors une véritable décadence urbaine.
Manhattan est l'exemple ultime de ces années 70-80 qui voient affluer délinquance et crime en son sein et ce par l'arrivé toujours plus importante de population marginalisée.
Un renversement total de la ville du 19°siècle bourgeoise qui reléguait les pauvres en dehors de ses murs. Un concept européen en soi qui devient obsolète aux Etats-Unis très rapidement dès le début du 20°siècle mais son apogée est décidément les années 70.
Le mouvement ne cessera de s'étendre pendant de longues années. L'apparition des grands magasins (big boxes) en périphérie ne fait qu'accentuer l'accélération toujours plus loin des villes des banlieues. Il n'est désormais plus rare de faire plus d'une heure de trajet pour atteindre son lieu de travail. On est loin des prix de l'essence actuel et l'abondance semble être inépuisable. Les américains profitent allègrement de leur puissance et richesse. Le boom de la consommation est à son apogée. Les shopping malls se construisent pas milliers partout. L'américain passe son temps libre à consommer encore et encore. La carte de crédit est devenu son meilleur ami. L'endettement explose. Les maisons toujours plus abordables ne cessent de se construire. Les promoteurs explosent leur chiffre d'affaire. La norme est ancrée dans les mœurs pour toujours semble-t-il: avoir son chez-soi a tout prix, parcelle de terre qui excelle au maximum l'individualisme du capitalisme sur lequel est basé toute la société américaine.
Au prémices de la bulle immobilière des années 2000, Georges W Bush ne cessera de prêcher ce mode de vie individualiste qui est la fierté de l'Amérique, le rêve ultime, le rêve américain qui fascine tant les européens.
De 2000 à 2006, les constructions neuves retrouvent leur niveau de 1950, c'est à dire un boom exponentiel de maisons neuves. Les banques accordent des crédits ridiculement accessibles pour tous. La machine s'enraie, le bonheur facile semble avoir atteint ses limites. La suite, on la connaît tous, on recherche encore les solutions à l'heure actuelle, en 2013, pour s'en sortir.
Quoi qu'il en soit, la formidable histoire de la fascination de ces banlieues américaines continue de ma passionner. Je pense que la civilisation a véritablement connu son moment de gloire en Amérique de 1950 à 2010.
La banlieue est réellement la personnification du capitalisme américain a l’extrême. C'est fascinant de voir un pays transformé son paysage a ce point. Jamais ailleurs dans le monde, toutes époques confondues, un pays n'a réussi à transformer la manière de penser de tout un peuple. Le succès de ce modèle est devenu par le suite la norme à copier partout à travers le monde.
On peut détester cette pensée, ce mode de vie, mais sans aucun doute, l'influence que la banlieue américaine a eu est sans aucunes mesures immense et toujours perceptible de par le monde.



Pour ceux intéressés, je recommande le livre suivant :
The End of the Suburbs
passionnant récit sur la naissance et l'évolution à travers les années de la banlieue américaine qui fait fasse actuellement à une remise en question de son modèle.




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